Avis JDP n°588/19 – PRESSE SPECIALISEE – Plainte fondée

Avis publié le 10 octobre 2019
Plainte fondée  

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 24 mai 2019, d’une plainte émanant d’un particulier, tendant à ce qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée sur Internet, en faveur d’un magazine automobile.

Cette publicité se présente sous la forme d’un encart montrant une femme sortant de son véhicule à l’arrêt, le haut du corps passant à travers la fenêtre ouverte de la voiture, pour utiliser un automate de paiement.

Le texte accompagnant cette image est « Offre proposée par ……, magazine aut…. Les perles de la conduite à mourir de rire. 20 photos qui montrent que, quand les femmes prennent le volant, il faut faire attention. Allez mesdames, ne… ».

Cette publicité renvoie à une page du site de l’annonceur.

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité renvoie à un cliché sexiste et s’apparente à de la provocation volontaire, en ces temps de sensibilisation au problème.

– La société responsable du site a été informée, par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juillet 2019, de la plainte dont copie lui a été transmise, des dispositions dont la violation est invoquée et de l’examen de l’affaire dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Le courrier a été retourné au Secrétariat du Jury avec la mention « Pli avisé et non réclamé ».

– La société responsable du site Internet sur lequel la publicité a été diffusée a également été informée, par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juillet 2019, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Son représentant fait valoir qu’en tant que diffuseur de plusieurs sites Internet de prévisions météorologiques, en métropole et en Outre-mer, elle a décidé de les monétiser via la commercialisation de publicité. Pour cela, l’Etablissement a délégué cette commercialisation à des régies publicitaires.

La société est particulièrement sensible à la qualité des messages diffusés sur ses sites et dans cet objectif, un document d’exigence sur les règles liées aux contenus des publicités est fourni à chacune des régies. Ce document a pour objectif de clarifier les règles de commercialisation des espaces publicitaires sur ses sites Internet, exigées par l’éditeur auprès de ses régies publicitaires.

Il prévoit que sont notamment bannies les publicités ayant pour objet : – la promotion de produits alcoolisés ; – la promotion du tabac ; – la publicité avec contenu sexuel explicite ou pouvant heurter la sensibilité des internautes ; – les publicités incitant à la haine, à la violence, au racisme, à l’intolérance sur la base de l’orientation sexuelle, des convictions religieuses ou politiques ; Et, plus généralement, l’ensemble des produits et secteurs dont la promotion est interdite à travers des dispositions spécifiques, ainsi que des publicités pour des produits et services concurrents de l’Etablissement.

Par ailleurs, chaque régie refuse toute annonce qui ne serait pas conforme aux recommandations de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité notamment relativement aux jeux d’argent et de hasard en ligne.

Dans ce cas précis, cette publicité avait déjà été signalée par d’autres voies et la régie publicitaire de ce site a immédiatement été prévenue, France TV Publicité en l’occurrence, du manquement à ses exigences en lui demandant de retirer sans délai ce type de publicité et de veiller à l’avenir que cela ne se reproduise pas.

Le nombre de pages vues sur les sites de la société dépassent 1 milliard par an et il peut malheureusement arriver que quelques publicités échappent aux différents contrôles. Ces cas sont heureusement extrêmement rares et la société s’engage à veiller à ce que ses régies fassent respecter, par les annonceurs présents sur les supports dont elle porte la responsabilité éditoriale, toutes les dispositions réglementaires et déontologiques précitées, ainsi que les règles sur les publicités diffusées sur ses sites internet et supports mobiles.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image et respect de la personne » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), dispose que :

« 2.2 La publicité ne doit pas cautionner l’idée de l’infériorité d’une personne en raison de son sexe, de son origine, de son appartenance à un groupe social, de son orientation ou identité sexuelle ou de tout autre critère de discrimination, notamment en réduisant son rôle et ses responsabilités dans la société.

2.3 La publicité ne peut valoriser, même indirectement, des sentiments ou des comportements d’exclusion, d’intolérance, de sexisme (…) ».

Le Jury relève que la publicité en cause se présente sous la forme d’un encart montrant une femme sortant de son véhicule à l’arrêt, le haut du corps passant à travers la fenêtre ouverte de la voiture, pour utiliser un automate de paiement.

Le texte accompagnant cette image est « Offre proposée par ….., magazine aut…. Les perles de la conduite à mourir de rire. 20 photos qui montrent que, quand les femmes prennent le volant, il faut faire attention. Allez mesdames, ne…. ».

Cette publicité renvoie à une page du site de l’annonceur.

Cet encart, apparu sur un site d’information météorologique, avait pour vocation d’inciter les lecteurs à se rendre sur un autre site, en l’occurrence celui de l’annonceur. Dans ce contexte, ces encarts, qui s’efforcent d’être les plus attractifs possible, peuvent être regardés comme des éléments publicitaires visant à promouvoir un site Internet.

En l’occurrence, l’encart ici en cause, pour renvoyer vers le site de l’annonceur, montre une situation relativement banale, qui peut arriver à tout automobiliste. Mais en utilisant la formule « quand les femmes prennent le volant, il faut faire attention », cette publicité laisse entendre que cette situation n’arriverait qu’aux femmes. En énonçant une phrase qui cautionne directement l’infériorité d’une personne en raison de son sexe, en l’espèce l’incompétence supposée des femmes au volant, l’encart en cause utilise ainsi une formulation sexiste pour renvoyer vers un site Internet.

En conséquence, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions précitées de la Recommandation « Image et respect de la personne ».

Avis adopté le 6 septembre 2019 par Mme Lieber, Présidente, Mme Gargoullaud, Vice-Présidente, Mme Drecq, MM. Depincé, Lacan, Leers et Lucas-Boursier.