Avis JDP n°194/12 – GRANDE DISTRIBUTION – Plainte partiellement fondée

Décision publiée le 21.06.2012
Plainte partiellement fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– après avoir entendu le représentant de l’Association Bloom et de la société annonceur,

– et, après en avoir délibéré, hors la présence des parties,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi le 21 mars 2012 d’une plainte émanant de l’Association Bloom, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur, d’une publicité diffusée en Presse, en faveur d’un groupement de distribution par la société annonceur à propos de la flotte de navires de pêche exploitée par l’armateur de pêche du groupement de distribution et de son engagement en faveur d’une « pêche responsable ».

Cette publicité se présente sous la forme d’un texte expliquant le choix et les engagements de l’annonceur pour une pêche responsable.

Cette annonce est précédée de l’accroche « Quand XXX s’engagent pour une pêche responsable, ce n’est pas un coup d’épée dans l’eau ».

Au bas de la publicité figure l’image d’un bateau de pêche en mer ainsi que 2 logos : celui de l’annonceur, l’autre, de forme ronde, divisée en deux par une ligne sinusoïdale, la première moitié représente une demi-planète de couleur verte, la seconde, un poisson stylisé dans un fond bleu, sous lequel figure la mention « pêche responsable ».

2.Les arguments des parties

L’association Bloom indique que cette publicité fait état de pratiques vertueuses incluant le respect des ressources naturelles et de l’environnement ainsi que la protection de la faune marine. Les éléments détaillés dans la publicité affirment au consommateur qu’il peut « savourer sans l’ombre d’un doute et pour longtemps encore ! » des poissons pourtant issus de pratiques de pêches dénoncées par les chercheurs, les ONG et l’opinion publique comme parmi les plus destructrices du monde.

Selon elle, il est possible qu’un certain nombre de navires de la flotte du groupement de distribution répondent, dans leurs pratiques, à la définition donnée dans la publicité d’une pêche « qui respecte durablement la nature » mais cela ne peut être le cas de la pêche réalisée en eaux profondes, car celle-ci met précisément en péril les écosystèmes marins comme les organismes profonds, qu’il s’agisse des espèces ciblées ou des prises accidentelles.

Elle fait observer que la publicité mentionne la lingue bleue et le sabre noir, des poissons capturés en profondeur au chalut comme répondant à la « reconnaissance “pêche responsable” », ce qui ne peut qu’induire les consommateurs en erreur.

Elle soutient que ces espèces d’eau profonde sont issues de captures évaluées en 2008, puis de nouveau en 2010 par le Conseil international de la Mer (CIEM) comme se trouvant à 100% « en dehors des limites de sureté biologique ».

La reconnaissance « pêche responsable », mise en avant comme un label sous la forme d’un logo et qui « auréole de conscience écologique des espèces capturées avec les méthodes de pêche les plus combattues et décriées dans le monde » conduit, selon la plainte, l’annonceur à opérer un habile glissement sémantique consistant à substituer un concept précis et exigeant (pêche durable) pour un autre, flou et sans aucune référence autre que subjective et privée (pêche responsable) ; ce choix des mots permettant de produire une confusion bénéfique avec « durable » dans l’esprit des consommateurs non experts.

L’association plaignante ajoute que le site Internet du Bureau Véritas auquel se réfère la publicité distingue explicitement les exigences des deux démarches. Elle relève que ce site précise ensuite que la « reconnaissance Bureau Veritas Pêche responsable » qui n’est donc pas une certification ni un label se fait selon un cahier des charges privé. Elle en déduit que Bureau Veritas met ainsi en place avec son client, le groupe annonceur, un cahier des charges adapté à la réalité de ses pratiques et s’assure ensuite que le client s’applique bien les normes qu’il a définies préalablement.

L’Association Bloom considère que cette publicité constitue une opération de « greenwashing » ou d’ « écoblanchiment » consistant à attribuer des mérites à un produit qui non seulement ne les possède pas et qu’elle ne respecte pas plusieurs points de la Recommandation développement durable de l’ARPP :

Le préambule sur la définition du développement durable, en ce que selon les données scientifiques du CIEM, les espèces vivant en eaux profondes, notamment le sabre noir et la lingue bleue sont trop lacunaires pour pouvoir connaître l’état des stocks de poissons, ce qui démontre que l’activité de pêche déployée sur ces espèces par l’annonceur n’est d’aucune façon en mesure d’assurer ne pas « compromettre l’aptitude des générations futures à couvrir leurs propres besoins ».

Sur la terminologie employée

La publicité détaille les qualités qu’elle attribue à ses pratiques de pêche « la préservation et le renouvellement des ressources marines », « une pêche responsable qui respecte durablement la nature », Le « respect des ressources naturelles », la « protection de la faune marine » et le « respect de l’environnement », alors que son activité de pêche au chalut profond contribue à réduire les stocks au-delà des limites de sûreté biologique et détruire le milieu marin profond.

Elle indique que le chalutage profond est une activité peu sélective et de ce fait incapable d’éviter la capture de certains organismes qui se trouvent systématiquement associés aux prises d’espèces ciblées comme le sabre noir. Il contribue en cela à mener certaines espèces au bord de l’extinction.

Selon l’association, cela signifie que le consommateur pensant « savourer sans l’ombre d’un doute » un poisson issu des pêcheries de l’armateur contribue en réalité comme le démontrent un certain nombre d’études à l’extinction de certaines espèces sauvages.

Il ne fait en conséquence pas de doute que les activités du groupement de distribution ont, au sens de la Recommandation, un impact négatif, lequel s’exprime notamment par la réduction de la biodiversité.

Sur le principe de véracité des actions

Du point de vue environnemental, la publicité induit le public en erreur en prétendant réaliser des actions en mer qu’elle ne mène pas. D’une part l’armateur de pêche ne préserve pas la ressource, il ne permet pas « le renouvellement des ressources marines » mais contribue au contraire à leur déplétion certaine et ne respecte pas « durablement la nature ». Elle cite à cet égard deux études montrant le caractère néfaste de la pêche en eaux profondes.

En outre, la publicité prétend avoir « choisi d’aller au-delà des usages ou de la réglementation » dans leur engagement en faveur d’une pêche responsable. Or, la recommandation indique que les actions doivent être significatives.

S’agissant enfin de la mention de « partenariats avec les scientifiques », elle rappelle que concernant les pêches profondes, la collaboration avec la recherche est une obligation faite aux nations de pêche (art.8 du règlement européen 2347/2002 du 16/12/2002 encadrant la pêche profonde au sein des eaux communautaires).

Sur le principe de proportionnalité

La plainte énonce que la flotte de pêche concernée est l’une des plus destructrices et que sa publicité « écoblanchit des pratiques inacceptables d’un point de vue environnemental et éthique » puisque quelques navires (en France il existe une dizaine de chalutiers profonds mais le groupement de distribution en possède les plus gros segments) s’approprient le bien commun d’une façon qui met en péril pour les générations à venir la productivité des écosystèmes exploités et leur préservation.

Elle considère qu’il serait judicieux de prendre la mesure des arguments internationaux pesant à charge contre cette méthode de pêche (et qui ont été entendus par l’ONU et par la Commission européenne) et de ne pas laisser proclamer impunément que la pêche au chalut profond est « responsable, respectueuse des ressources naturelles, de l’environnement et de la faune marine ».

Sur le principe de loyauté

Pour que l’assertion « respect des ressources naturelles » des « pêches effectuées sur des stocks de poissons gérés », le mot « géré » devrait être remplacé par « sous quotas » car ce premier terme laisse le lecteur non averti penser aux vertus de la « gestion » c’est-à-dire de l’administration planifiée. Or, avec les espèces profondes, passées sous quotas en 2003 il n’en est rien (moins de 10 ans après le passage sous quotas, par exemple, la population d’empereurs a été considérée épuisée et la pêche interdite depuis 2010).

De surcroît, les quotas s’appliquent en outre à l’ensemble des flottes de pêche profonde européennes sans exception, donc, pêcher des stocks de poissons sous quotas ne présente aucun caractère exclusif dont le groupement de distribution pourrait se targuer.

De plus, la plaignante fait valoir que le volet « respect de l’environnement » fait état de :

« Réduction des rejets et des déchets, choix de consommables biodégradables ou peu polluants », alors que ce faisant, la flotte du groupement de distribution ne fait qu’appliquer les dispositions d’une convention internationale, MARPOL, datant de 1978, pour prévenir les pollutions en mer par les navires, laquelle a contraint les bateau à choisir des consommables biodégradables. Ces dispositions s’appliquent à tous les navires battant pavillon d’un Etat signataire du traité. Les arguments listés dans la publicité s’imposent à tous du fait de la loi.

« Réduction de l’empreinte carbone liée au transport du poisson », alors que l’équilibre financier précaire en raison de pêches très intensives en coûts et notamment en gasoil puisque le chalutage profond nécessite une puissance motrice très importante et d’une ressource (poissons profonds) qui montrait déjà des signes de déclin rapide. Un système de « bases avancées » permettant de débarquer le poisson en Irlande ou en Ecosse et de l’acheminer par camion a donc été mis en place dès 1998. La démarche de réduction de l’empreinte carbone ne semble donc s’appliquer que dans le cadre d’une optimisation financière et il n’apparaît pas justifié de laisser cette démarche de réduction des coûts et d’optimisation de l’outil de travail propre à toute entreprise industrielle être revendiquée dans le volet « respect de l’environnement » comme si elle avait émané d’une visée écologique puisqu’il n’en est rien.

Sur la règle relative aux signes, labels, logos

Selon la plaignante, la publicité correspond manifestement à une démarche privée et rémunérée dans laquelle le Bureau Veritas est juge et partie dans une relation commerciale à son client. Il ne s’agit donc pas d’une « certification par un tiers » au sens de la recommandation et encore moins d’une « approbation officielle » contrairement à ce que la publicité laisse entendre lorsqu’elle parle de la « reconnaissance d’un organisme indépendant reconnu dans la certification ».

Elle ajoute que le visuel du logo présente une forte ressemblance avec le label indépendant mondialement connu et reconnu du Marine Stewardship Council (MSC) dans le but évident de créer une confusion dans l’esprit des consommateurs.

Enfin la plainte fait valoir que la publicité s’adjoint un lexique soigneusement choisi :

  • La flotte du groupement de distribution devient-elle le hérault d’un « engagement militant » expression propre aux combats idéologiques d’ONG
  • Le fait de s’imposer « un cahier des charges » alors que ce dernier est soigneusement choisi et fabriqué sur mesure mais que le verbe « s’imposer » fait apparaître comme une contrainte ;
  • L’expression qui affranchit les consommateurs de toute culpabilité « à savourer sans l’ombre d’un doute…»

L’utilisation de ces expressions a pour but et pour effet de tromper les consommateurs et les induire en erreur concernant les actions de l’annonceur.

L’hebdomadaire A, indique qu’il ne peut se prononcer sur les nombreux griefs contenus dans la plainte, relatifs au respect de cette recommandation, qui relèvent d’une appréciation technique et spécialisée de l’annonceur lui-même.

Il exprime que la jurisprudence judiciaire retient constamment que l’éditeur ne peut être responsable, sauf à avoir participé lui-même à la conception de la publicité, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Le groupe B fait valoir également qu’il n’a aucune observation à formuler s’agissant d’un débat au fond sur les revendications de l’association Bloom en matière de techniques de pêche.

L’hebdomadaire C fait valoir qu’il respecte la charte de l’ARPP et que cette publicité ne lui a pas semblé contrevenir aux règles de l’ARPP. Il précise qu’il n’est pas en mesure de démonter les arguments de la plainte, compte tenu de sa technicité.

L’annonceur, pour le groupement de distribution, fait valoir qu’il s’est investi dans la pêche maritime en France depuis le milieu des années 1990, dans un contexte de crise du secteur.

A ce jour, l’armateur de pêche arme 17 navires, de pêche côtière et de pêche au large.

Fort de grandes ambitions pour les pêches françaises et européennes, mais aussi dans la perspective de se donner des directives claires dans une vision complète des enjeux de ses activités, l’armateur a lancé depuis 2006 une démarche dite de « Pêche responsable ».

Les pouvoirs publics français se sont d’ailleurs directement inspirés de cette vision et de cette expérience en lançant, en Mars 2010, le référentiel de la marque collective « pêcheur responsable ».

Cette démarche de « Pêche responsable » constitue le projet d’entreprise de l’armateur, en tant qu’elle structure des démarches de progrès, mais aussi la stabilisation de bonnes pratiques, sur quatre grands volets complémentaires : la ressource halieutique, l’environnement marin, le bien-être des marins et la satisfaction du consommateur.

Elle porte sur 3 pêcheries : la légine australe des Terres Australes et Antarctiques Françaises, le tourteau pêché au large de la Bretagne et 5 espèces (lieu noir, merlu, baudroie, sabre noir et lingue bleue) pêchées au chalut de fond par 3 navires.

Elle indique que la plainte contient de nombreuses approximations

Sur l’unanimité supposée des dénonciations à l’encontre de la pêche des espèces d’eau profonde au chalut : L’annonceur conteste la réalité de cette unanimité et soutient qu’il n’existe pas d’« arguments internationaux pesant à charge contre cette méthode de pêche », ni au sein de la communauté scientifique, ni à l’ONU, ni de la part de la Commission européenne, ni parmi les ONG. Elle relève que le Grenelle de la mer a mandaté une mission sur « l’avenir des pêches profondes », qui a recommandé, en juin 2010, la continuation de l’activité de pêche des espèces d’eau profonde au chalut, tout en préconisant 11 axes d’évolutions.

Elle ajoute que l’assertion selon laquelle « XXX s’approprierait le bien commun » méconnaît la réalité de la régulation des pêches et/ou vise à dépeindre l’armateur  de pêche en prédateur illégitime.  Les activités de pêche sont régulées, sur le fondement des avis scientifiques, par la réglementation européenne des pêches. Depuis la loi d’orientation sur la pêche du 18 novembre 1997, la ressource halieutique à laquelle la France accède est constitutive d’un « patrimoine collectif ». Les conditions dans lesquelles des navires sont autorisés à pêcher dans une zone sont fixées, selon la loi française, en fonction de trois critères complémentaires : les antériorités, les équilibres socio-économiques et les équilibres du marché.

L’annonceur précise que les termes de « chalut profond » ou de « chalutier profond » n’existent dans aucune nomenclature technique ni officielle.

A l’instar de ce que font tous les pêcheurs concernés, les navires de l’armateur de pêche travaillent avec les mêmes chaluts, utilisés pour la capture d’espèces démersales (vivant au fond ou à proximité), quelle que soit la profondeur et l’espèce ciblée.

L’annonceur ajoute qu’il est difficilement compréhensible que la plaignante évoque, pour la lingue bleue, un rapport scientifique portant sur des zones qui ne sont pas fréquentées par les navires de l’armateur de pêche. Les navires de l’armateur travaillent en effet en ouest Irlande et ouest Écosse (zones CIEM Vb, VI et VII) et non pas dans les zones I, II, II, IV, X, Va, XIV.

Il fait valoir que les capacités de l’armement pêchant des espèces profondes a diminué de façon très significative en très peu d’années : flottille réduite de 56%, la puissance de 47% et la jauge de 41%. Les raisons de cette restructuration sont principalement le vieillissement des navires (problèmes de fiabilité, de sécurité, pertes d’exploitations, entretiens lourds, etc.) et la nécessité d’adapter la capacité de capture aux quotas disponibles.

Concernant « l’effort de pêche accru » sur les espèces d’eau profonde.

L’annonceur indique que des pays à la forte sensibilité environnementale comme le Canada, la Norvège ou la Nouvelle Zélande pratiquent la pêche d’espèces d’eau profonde au chalut de fond. Ils le font dans le cadre de collaborations étroites entre pouvoirs publics, professionnels de la pêche, scientifiques et associations environnementalistes. C’est ce qui a conduit ces États à adopter des mesures de protection des écosystèmes vulnérables (zones protégées, « move on rule »), tout en permettant de maintenir une activité de pêche commerciale.

A titre d’exemple, le partenariat noué au Canada, en Colombie Britannique, entre pêcheurs au chalut de fond et l’une des plus grandes ONG canadiennes (Living Oceans Society), a permis, dans un dialogue raisonné et concret, d’avancer sur des mesures de protection des écosystèmes, sans pour autant condamner l’activité dans son ensemble.

En raison de la sensibilité de l’exploitation de ressources naturelles, la pêche des espèces d’eau profondes est très réglementée, et se base sur les avis scientifiques du CIEM : limitations de l’effort de pêche, contingentement du nombre de navires autorisés (permis de pêche spéciaux), limitation des débarquements (quotas), maillage des engins, zones de protection des écosystèmes marins vulnérables, zones de protection des agrégations de lingue bleue, embarquement d’observateurs scientifiques, etc.

Par ailleurs, des mesures de suivi et de contrôle très pointues permettent aux pouvoirs publics de s’assurer du respect des réglementations : suivi satellitaire, déclaration de pêche électronique quotidienne, ports de débarquements désignés, préavis de débarquement, documents de transports, etc.

La biomasse des poissons d’espèces profondes pourrait avoir été réduite à 50% de la biomasse inexploitée. Toutefois, considérant que la biomasse ne décline plus, un tel niveau correspondrait à une exploitation durable et peut-être même au niveau du rendement maximum durable au niveau de la population.

Sur la sélectivité des pratiques de pêche, contrairement à ce que la plaignante évoque, l’activité de pêche au chalut de fond pratiquée sur les espèces d’eau profonde est l’une des plus sélectives, comme l’établit le rapport de l’Ifremer issu des observations scientifiques à bord des navires.

Cette bonne sélectivité s’illustre :

  • par un taux de rejet global, sur la pêche des espèces d’eau profonde au chalut, qui est au rang de 3ème meilleure performance en France au chalut de fond
  • par des rejets très faibles ou nuls sur le sabre noir et la lingue bleue

L’argument des impacts des chaluts de fond sur le « fond des océans » souffre de grandes fragilités : la destruction des coraux d’eau froide ne correspond pas à la réalité de l’activité des navires car :

  • ces écosystèmes, effectivement vulnérables et fragiles, font l’objet d’une protection, par le biais de zones de fermeture à toute pêche
  • les navires travaillent sur des fonds fréquentés depuis plusieurs décennies, non seulement sans extension à de nouvelles zones, mais en repli vers des zones à la fois plus réduites, moins profondes et moins lointaines.
  • La surface fréquentée de fait par les chalutiers de l’armateur de pêche dans l’ouest des îles britanniques entre 400 et 1500 m de profondeur est très largement inférieure à 10% de l’espace total. Plus de 90% de l’espace, dans ce périmètre, est donc protégé de fait.
  • La nature des fonds fréquentés est constituée de substrats de sable et de vase avec un contenu organique faible ou modéré, similaire aux sédiments rencontrés dans les zones du plateau continental en faible profondeur. Les zones constituées de fonds durs ou de monts sous-marins (à proximité desquels ou sur lesquels se trouvent les massifs de coraux d’eau froide) ne sont pas fréquentées par les navires de l’armateur.

L’annonceur soutient que la pêche du sabre et de la lingue bleue au chalut de fond ne contrevient pas au développement durable. Il précise que les rapports scientifiques ne se sont à aucun moment prononcés pour une interdiction de cette pêche, mais énoncent des recommandations visant à sa gestion durable (limitations de captures, zones de protection le cas échéant).

Les rapports cités par la plaignante sont ceux publiés en 2010, basés sur des données datant au mieux de 2009, soit il y a plus de deux ans.

Pour ce qui est des zones qui concernent l’armateur de pêche, le rapport du CIEM sur la lingue bleue en 2010 juge que les données de rendement et les indices d’abondance, issues des données collectées par l’Ifremer auprès des navires professionnels, mais également des campagnes scientifiques irlandaises et écossaises, suggèrent une augmentation de l’abondance dans les années récentes.

Enfin, il expose que le dernier avis scientifique issu du groupe de travail du CIEM sur les espèces d’eau profonde paru la veille de la séance du Jury n’alerte nullement sur la nécessité de limiter la pêche du sabre noir et la lingue bleue.

L’annonceur fait valoir que la démarche « Pêche responsable » des armements du groupement à la pêche est une démarche sérieuse et loyale qui doit être distinguée de la certification « Marine Stewardship Council » de pêche durable, qui couvre uniquement la gestion de la pêcherie, sans impliquer très concrètement les femmes et les hommes concernés ni remettre en cause leurs pratiques.

Il ne s’agit pas d’un « label » ni d’une certification, mais d’une reconnaissance d’un ensemble de critères prédéfinis par un organisme extérieur à l’entreprise.

Depuis avril 2008, l’armateur de pêche a obtenu la reconnaissance « Pêche responsable » pour une partie de ses chalutiers et certaines espèces. Cette démarche, formalisée par la signature du « Contrat de reconnaissance », est la « reconnaissance de la conformité d’un produit ou processus à un référentiel (cahier des charges, méthodologie, etc.) établi par l’entreprise et examiné par le Bureau Veritas ». Ce dernier « procède à l’exécution d’un programme de reconnaissance ayant pour objet l’évaluation technique de l’établissement et de l’organisation de la qualité, concernant les produits pour lesquels la reconnaissance est demandée ». « La reconnaissance ne peut être prononcée qu’à l’issue du déroulement satisfaisant de ce programme ; elle est matérialisée par la délivrance d’une attestation de reconnaissance, qui en fixe la durée de validité. »

Les conditions générales de service précisent explicitement au chapitre 12 (« Indépendance des parties ») que « chaque partie agit dans son intérêt propre et conserve son autonomie. (…) Chaque partie agit sous sa propre responsabilité et n’a pas la qualité de mandataire ou d’agent de l’autre partie ».

Par son champ élargi de critères, le programme de reconnaissance implique l’intervention d’experts dans 3 domaines de compétence : la ressource halieutique (dont suivi des avis scientifiques, validation des engagements, contrôle embarqué, etc.), le navire (Bureau Veritas Marine) et la qualité des produits.

Le Bureau Veritas, organisme spécialisé dans la certification, l’audit et le contrôle, engage évidemment sa crédibilité dans cette démarche d’entreprise. Sa compétence reconnue mondialement dans les secteurs alimentaire et maritime a été un critère de choix pour l’armateur de pêche.

Sur la ressemblance énoncée avec le logo Marine Stewardship Council (MSC), l’annonceur explique que dès l’origine au contraire, l’objectif de cette démarche, sur le fond comme sur la forme, a été de se démarquer du MSC, notamment parce que son champ d’engagement se veut plus complet et plus vaste.

Il ajoute que la philosophie générale de sa démarche est de prendre pleinement en considération les 3 piliers du « développement durable » : la ressource et l’environnement, le social et l’économique. A ce titre, la relation contractuelle entre Bureau Véritas et l’armateur de pêche entraîne très explicitement que la démarche de « Pêche responsable » intègre des pratiques vérifiables et mesurables allant au-delà de la réglementation ou des usages. Cela rapproche cette démarche de pratiques classiques de la normalisation et de la certification, avec un cahier des charges dont la structure est identique (« points à maîtriser », « valeur cible et tolérance », « moyens de maîtrise », « plan de contrôle interne », « document preuve »).

Elle intègre  aussi des plans de progrès, sur l’ensemble des critères. Cela différencie cette démarche de celle de la certification et de la normalisation, qui sont par essence figées et stabilisées, alors qu’il s’agit ici d’améliorer constamment les pratiques de pêche.

L’annonceur fait valoir que la démarche de « Pêche responsable » n’est pas un concept « flou et sans aucune référence autre que subjective et privée », puisqu’il se fonde explicitement et très directement sur le « Code de bonne conduite pour une Pêche responsable » de la FAO (1995), organisme rattaché à l’ONU. De fait, ce concept intègre la pêche durable, mais couvre un champ plus large encore, en prenant en compte le volet humain de cette activité (sécurité, conditions de travail, conditions sociales, etc.), mais aussi le consommateur (qualité, fraîcheur, sécurité alimentaire, etc.).

L’annonceur conteste par ailleurs de manière détaillée les critiques formulées dans la plainte concernant d’une part, la réduction des rejets et déchets, de choix de consommables biodégradables ou peu polluants, d’autre part, la réduction de l’empreinte carbone, l’utilisation de navires récents et le renouvellement de la flotte du groupement.

Il invoque trois exemples, intégrés dans le cahier des charges « Pêche responsable », qui prouvent que la collaboration entre l’armateur de pêche et les scientifiques va largement au-delà de la réglementation :

Collecte de données de pêche :

Pour améliorer la qualité et la quantité de données servant à l’expertise scientifique, l’armateur de pêche a collecté et transmis à l’Ifremer depuis 2001 des données d’effort de pêche et de captures, trait de chalut par trait de chalut, pour plus de 36 000 opérations de pêche à ce jour.

Au cours des dernières années, les données recueillies dans le cadre du programme professionnel sont 10 fois plus abondantes que celles provenant du programme d’observations prévu par la réglementation.

Ces données ont été transmises à l’Ifremer pour analyse et soumission au groupe de travail du CIEM sur les espèces d’eau profonde (WGDEEP), chargé d’établir les évaluations de l’état des stocks servant de base aux mesures de gestion de la pêcherie. La pertinence et l’intérêt des résultats de ces travaux novateurs – en tout cas pour les analyses de l’état des stocks réalisées par le CIEM – sont unanimement soulignés.

Dans le temps, ces données devraient être utilisées par les scientifiques écossais pour compléter leurs données sur la baudroie, qui est d’ailleurs l’une des espèces pêchée par l’armateur de pêche et intégrée dans la reconnaissance « Pêche responsable ».

Travaux sur la diminution des impacts et des rejets :

L’Ifremer, Cofrépêche et l’armateur de pêche ont été retenus en 2012 par la Commission européenne pour travailler à la réduction des impacts des engins et des rejets sur la pêche des espèces d’eau profonde au chalut. Par ailleurs, l’armateur de pêche s’est entouré de la compétence d’un spécialiste reconnu des techniques de pêche, dont la mission est de travailler à l’amélioration de la sélectivité et à la diminution des impacts des engins de pêche. Cette embauche récente est probablement unique dans une entreprise de pêche.

Contributions au projet européen DEEPFISHMAN :

Ce projet, mené par 13 instituts scientifiques européens a pour but central de définir un cadre de gestion et de suivi des pêcheries profondes européennes. Dans ce cadre, l’armateur de pêche transmet des données sur l’activité de pêche, sous ses aspects halieutiques et socio-économiques, et participe à des échanges réguliers avec son coordinateur. Ces relations avec les scientifiques sont d’une exceptionnelle densité, ce qui en fait un exemple sans doute unique en Europe. L’armateur de pêche a introduit ces pratiques volontaristes dans son cahier des charges « pêche responsable ».

Sur la réalité et le caractère significatif des mesures adoptées dans le cadre de la reconnaissance « Pêche responsable », le cahier des charges intègre des pratiques vérifiables et mesurables, allant au-delà de la réglementation, sans lesquelles le Bureau Veritas n’accorde pas sa reconnaissance.

Par ailleurs, des plans de progrès font l’objet d’actions d’améliorations constantes.

Il énonce, enfin, un certain nombre d’éléments qui démontrent qu’il mène réellement des actions significatives :

Le cahier des charges « Pêche responsable » intègre dès sa construction, en 2007, une mesure de limitation de la pêche de lingue bleue à la marée, interdisant de fait toute pêche ciblée, et répondant ainsi à la recommandation scientifique de ne pas cibler les concentrations de poissons. Alors que la réglementation européenne imposait 25 tonnes maximum à la marée, le cahier des charges « Pêche responsable » limite les navires à 15 tonnes par marée. Cette limitation est toujours appliquée aujourd’hui alors que la réglementation n’en impose plus.

La pêche du sabre noir fait l’objet d’autolimitations par l’armement à la marée

L’armement assure un suivi satellitaire des navires, moyen de s’assurer du respect des zones de pêche et de l’activité des navires.

L’armement fixe des plans de pêche pour les navires et assure un suivi à la marée (limitations de pêche).

L’armateur de pêche a été retenu en 2012, avec Ifremer et Cofrépêche dans le cadre d’un appel d’offre de la Commission européenne pour travailler à la réduction des impacts et des rejets des engins.

Recherche de diminution de la consommation de carburant. Un projet a été lancé dans ce sens, avec des filets qu’aucun pêcheur n’utilise à ce jour en Europe.

Travail de fond sur la sécurité des marins en mer, avec embarquement pendant une marée de spécialistes reconnus dans le milieu maritime (Institut Maritime de Prévention)

Formation des équipages.

Ces éléments sont attestés, reconnus et très significatifs, en tant qu’ils vont très au-delà des obligations faites à l’armateur de pêche, mais également des usages dans le secteur des pêches en France et en Europe.

3.Les motifs de la décision du Jury

 Le Jury rappelle que la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP prévoit que :

 « Préambule :

Le développement durable est défini par “la capacité des générations présentes à satisfaire leurs besoins sans compromettre l’aptitude des générations futures à couvrir leurs propres besoins” (Rapport Bruntland, 1987).En d’autres termes, il s’agit d’assurer le progrès économique et social sans mettre en péril l’équilibre naturel de la planète, actuel et à venir. »

« Véracité des actions

1.1 La publicité ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable.

1 3 Les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées. »

 « Proportionnalité des messages

2 2 Le message publicitaire doit être proportionné à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion. »

 « Signes, labels, logos, symboles, autodéclarations

5 1 Les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification.

Les précisions sur cette signification pourront être apportées aux conditions définies par l’article 3-4 de ce texte.

5 2 Ces signes ne doivent pas être utilisés de manière à suggérer sans fondement une approbation officielle ou une certification par un tiers.

5 3 La publicité ne doit pas attribuer aux signes, logos ou symboles une valeur supérieure à leur portée effective. »

Le Jury relève que la publicité du groupement de distribution utilise deux notions destinées à valoriser l’action de sa flotte de pêche et par voie de conséquence ses produits : ceux de « pêche responsable » et de « pêche durable ».

Le terme de « pêche responsable » apparaît issu d’une recommandation du Comité des pêches réuni au sein de la Convention des Nations Unies au début des années 1990 et ayant conduit la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) à établir un code de conduite pour une « pêche responsable » en 1995. Ce code  fait mention, dans sa préface, de la prise de conscience de ce que le caractère renouvelable de la ressource halieutique n’était pas infini et des nécessités de conduire les Etats à « gérer convenablement » cette ressource ainsi que « d’assurer aux pêcheries un caractère durable ».

Il ressort par ailleurs des informations figurant sur son site que le service d’accréditation international (ASI) a accrédité Bureau Véritas Certification (le Bureau Véritas) « pour l’activité pêche, selon le référentiel MSC (Marine StewardShip Council) dont l’objectif est de valoriser les pratiques responsables ». Le MSC est une organisation non gouvernementale dont l’activité de certification de la pêche responsable est mondialement reconnue. L’impartialité et l’objectivité tant du Bureau Veritas que de la méthode de certification à laquelle il se réfère n’apparaissent donc, en l’état de ces éléments, pas pouvoir être mises en doute.

Le site du Bureau Véritas permet encore de constater que le processus de certification débute par un diagnostique effectué par ses propres experts qui analysent les « objectifs et le méthodes » du candidat et proposent « des plans d’action sur mesure ».

La deuxième phase consiste à définir un cahier des charges concernant l’armement de la pêcherie ou de la filière « qui peuvent couvrir 5 niveaux de responsabilité vis-à-vis : des ressources naturelles (captures respectant le seuil de renouvellement du stock, amélioration de la sélectivité, réduction des prises accessoires, de la consommation d’eau et d’énergie), de l’environnement  (respect des écosystèmes et de la biodiversité, réduction de la pollution, des rejets en mer, emprunte carbone …), des équipages (amélioration de la sécurité respect des droits du travail, bonnes pratiques sociales, formation, de la sécurité sanitaire et la qualité des produits (…), du développement local et du partage équitable de la valeur (…) ».

La troisième phase consiste en « la certification ou la reconnaissance initiale » et la quatrième dans la surveillance annuelle et l’évaluation du plan de progrès.

L’annonceur produit la copie d’une lettre adressée à l’armateur de pêche, société gestionnaire de sa flotte, indiquant que sa reconnaissance « Poissons frais (Lieu noir, lingue bleue, baudroie, sabre noir et merlu issus de pêche responsable / développement durable » repose sur un cahier des charges « appartenant à XXX » et couvrant trois navires jusqu’au 1er février 2011, cette reconnaissance ayant été initiée en 2008.

Si le cahier des charges est ainsi mentionné comme étant spécifique à l’armateur de pêche, il est néanmoins précisé, dans la suite de cette lettre, que celui-ci « intègre les recommandations du Code de conduite de la FAO pour « une pêche responsable » de 1995 et qu’il repose sur des critères auditables, relatifs au respect des ressources halieutiques et de leur environnement, à la sélection d’une méthode de pêche respectant l’environnement, au respect des droits sociaux et de la sécurité maritime pour les équipages embarqués, qualité sanitaire et organoleptiques des produits (etc…) ».

Il est ensuite énoncé que ce cahier des charges est validé par un comité d’experts techniques et qu’il inclut les exigences réglementaires et les recommandations du code de conduite de la FAO et qu’il doit aller au-delà de ces exigences pour obtenir la reconnaissance du Bureau Veritas.

Il apparaît donc au regard de ces précisions que le groupement de distribution ne se prévaut pas de manière injustifiée ou abusive des termes « pêche durable » et « pêche responsable ». Ces deux qualifications qui sont effectivement distinguées par Bureau Veritas peuvent néanmoins être obtenues ensemble et il ressort des termes de la lettre précitée que l’armateur de pêche a reçu la « reconnaissance » de l’organisme pour les deux qualifications.

Selon l’Association Bloom il est impossible de revendiquer les qualificatifs de pêche « durable » ou « responsable », alors que les évaluations du conseil international pour l’exploration de la mer ont indiqué que l’état des stocks de sabre noir et de Lingue bleue était inconnu, qu’aucune évaluation fiable ne peut être présentée pour certaines zones et qu’aucune projection ne peut être réalisée pour les possibilités de pêche.

Quelle que puisse être la pertinence de ces objections, qui relève d’une appréciation scientifique et ne ressort pas de la compétence du Jury, celles-ci n’apparaissent en tout état de cause pas de nature à empêcher l’armateur de pêche de se prévaloir des qualificatifs dont il a obtenu la reconnaissance et donc l’autorisation d’emploi auprès d’un organisme dont l’objectivité est reconnue.

Il n’apparaît en conséquence pas que la publicité en question ne respecte pas la recommandation de l’ARPP ni en ce qui concerne son préambule, ni en ce qui concerne la véracité des actions.

S’agissant de la proportionnalité des messages, il est établi par la reconnaissance « pêche responsable et pêche durable » du Bureau Veritas que les méthodes de pêche de l’armateur sont mises en œuvre dans le « respect des ressources halieutiques et de leur environnement ».

Le Jury relève cependant que le premier paragraphe du texte de sa publicité précise que le groupement de distribution exploite une flotte propre « pour pouvoir jouer un rôle déterminant dans le maintien durable de la pêche en France qui passe par la préservation et le renouvellement des ressources marines ».

La plaignante souligne qu’une telle allégation ne peut être admise de la part d’une société qui pratique la pêche au chalut, laquelle est particulièrement destructrice pour l’environnement.

Le Jury considère que, là encore, les critiques formulées contre la pêche au chalut en eaux profondes relèvent d’une appréciation scientifique et de politique environnementale sur lesquels il ne peut, en l’absence d’éléments précis et officiellement établis, se prononcer.

Cependant, l’affirmation selon laquelle le groupement de distribution peut, ou pourrait, par sa flotte de pêche, « jouer un rôle déterminant dans le maintien durable de la pêche en France qui passe par la préservation et le renouvellement des ressources marines » apparaît présenter de façon excessive l’intervention de ce groupe dans la préservation et le renouvellement de l’environnement.

En effet, s’il n’est pas contestable que le groupe ait obtenu la reconnaissance de pêche responsable et de pêche durable, cette reconnaissance atteste de ce qu’elle respecte, dans ses pratiques les ressources naturelles et l’environnement et non de ce que son rôle serait reconnu comme « déterminant » c’est-à-dire comme un facteur particulièrement moteur et essentiel de la préservation des ressources et de l’environnement.

Par ailleurs, si les actions et participations décrites par le groupement, dans ses observations, tendent à démontrer un engagement réel dans la préservation des ressources halieutiques, le Jury observe que ni le cahier des charges, ni aucun autre élément lui permettant de vérifier leur réalité ne lui ont été présentés et que, fussent-elles établies, ces actions constituent des contributions qui seraient, certes, significatives et importantes, allant au-delà des obligations imposées par la réglementation, mais qu’elles ne peuvent néanmoins, en l’état, être qualifiées de « déterminantes ».

Sur ce point, la publicité présente de façon exagérée le rôle du groupement de distribution et pourrait être de nature à induire dans l’esprit du public une idée erronée de la réalité des actions de l’annonceur en matière de développement durable.

Cette présentation contrevient aux dispositions 1.1 et 2.2 de la Recommandation de l’ARPP sur le Développement durable.

Sur le logo :

Afin de témoigner de son action, le groupement de distribution a fait concevoir et applique sur sa publicité un auto-label qui, ainsi qu’il a été décrit supra, consiste en un cercle divisé en deux moitiés par une ligne sinusoïdale blanche. La première moitié, de couleur verte, représente une moitié de la planète, la seconde, de couleur bleue foncée, représente un poisson stylisé par une ligne courbe continue marquant la tête, le dos et la nageoire caudale, un trait arrondi dessous représentant le ventre et un point blanc figurant l’œil.  Sous le dessin est inscrite la mention « pêche responsable ».

Ce deuxième dessin présente par ses couleurs, les formes du poisson stylisé, ainsi que par la forme ovale du fond bleu, des caractères similaires au dessin du label de l’organisme Marine Stewardship Council (MSC) qui, comme l’indique la plaignante, est un label indépendant mondialement connu et reconnu concernant le caractère respectueux de l’environnement de la pêche.

Si le dessus du dessin représentant une planète verte, distingue bien les deux labels, il n’en demeure pas moins que sa partie inférieure, de forme ovale et montrant un poisson qui, s’il n’est pas identique, ressemble néanmoins incontestablement à celui du MSC.

Cette présentation est susceptible d’induire une confusion dans l’esprit des consommateurs entre les deux labels. Il existe donc bien un risque de confusion quant à la signification de la certification MSC et l’auto-label « Pêche responsable » du groupement de distribution.

Cet annonceur ne respecte pas, à ce sujet, le point 5.1 de la recommandation de l’ARPP sur le développement durable.

4.La décision du Jury

– La plainte est partiellement fondée;

– La publicité relative à l’activité de pêche du groupement de distribution ne respecte pas  la recommandation de l’ARPP sur le développement durable, d’une part, en ce qu’elle peut par son libellé, conduire à penser que celui-ci joue un rôle « déterminant » dans le maintien durable de pêche en France, la préservation et le renouvellement des ressources marines (points 1.1 et 2.2 de la recommandation), d’autre part, en ce que la partie de son auto-label « Pêche responsable » présente une forte ressemblance avec le label du MSC et comporte un risque de confusion quant à la signification de ce logo (point 5.1 de la recommandation) ;

– Il est demandé au directeur général de l’ARPP de prendre toute mesure pour faire cesser cette publicité et qu’elle ne soit pas renouvelée;

– La présente décision sera communiquée à l’association plaignante, à l’annonceur, au groupe B et aux sociétés éditant les hebdomadaires A et C.

– Elle sera diffusée sur le site Internet du JDP.

Délibéré le 1er juin 2012, par Mme Michel-Amsellem, Vice-présidente, en remplacement de la présidente empêchée, Mmes Drecq et Moggio et MM Benhaïm, Carlo, Leers et Lacan.