Avis JDP n°268/13 – AUTOMOBILE OCCASIONS – Plainte fondée

Décision publiée le 30.08.2013
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– et, après en avoir délibéré dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend la décision suivante :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 10 juin 2013, d’une plainte de l’Association Chancegal et de sa cellule de veille médiatique Alerte Sexisme 974, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur d’un distributeur de véhicules d’occasion.

La publicité en cause, diffusée par voie de presse, montre plusieurs vignettes de véhicules proposés à la vente au-dessus desquelles se trouve la photo d’une jeune femme blonde vêtue d’une jupe courte et de bottes montantes et portant des lunettes de soleil. Elle est assise dans une voiture de sport, les jambes dépassant à l’extérieur.

Le texte accompagnant cette image est « Résisterez-vous à autant d’avantages ? ».

Un peu plus bas, un encart rouge comporte la mention « Jusqu’à 4000€ de remise sur l’occasion».

2.La procédure 

L’annonceur a été informé par courrier recommandé du 21 juin 2013 de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Il a été également informé que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du JDP.

 L’Association Chancegal a également été informée par lettre recommandée avec accusé de réception, de l’examen de sa plainte. Le recommandé a cependant été retourné au secrétariat du Jury avec la mention « Pli avisé et non réclamé ».

Le journal diffuseur, a été informé par courrier recommandé du 21 juin 2013 de l’examen de la plainte dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du JDP.

Il n’a pas présenté d’observations.

 3.Les arguments des parties

L’association plaignante fait valoir dans sa plainte que cette publicité porte atteinte à la dignité de la personne humaine.

Elle précise que, créée en 2001, elle a pour mission de promouvoir l’égalité des chances entre les femmes et les hommes à La Réunion dans les domaines de la vie professionnelle, quotidienne et citoyenne.

Elle indique que l’enquête nationale sur les violences envers les femmes à la Réunion, publiée  en 2003 par les services de l’Etat (DRASS de la Réunion et Département), constate que dans ce département  plus d’une femme sur cinq a subi au moins une forme de violence dans un espace public au cours des 12 derniers mois, soit plus qu’en Métropole, que les agressions physiques et surtout sexuelles dans l’espace public sont plus fréquentes, signe d’un espace public plus sexiste et que la violence conjugale y est plus élevée.

Concernant le contenu de la publicité, objet de la plainte, l’association relève que la mise en scène et l’association des slogans laissent penser que la femme est à vendre au même titre qu’une voiture. La vignette rouge se rapporterait à son prix et le slogan semble prononcé par la femme fixant l’objectif, comme une invitation à profiter de ses charmes.

Trois des principes érigés par la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP lui semble être concernés par cette publicité : ceux relatifs aux notions de représentation dégradante, d’objet sexuel et de soumission et dépendance.

L’annonceur fait valoir que l’Ile de la Réunion fait l’objet d’un acharnement et qu’en France, les femmes sont libres de s’habiller comme elles l’entendent. Elle précise que son activité fait vivre plusieurs familles et qu’elle transmet le dossier qui lui a été adressé à son avocat.

Celui-ci n’a pas présenté d’observations dans le délai de réponse qui avait été imparti.

4.Les motifs de la décision du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation Image de la Personne Humaine de l’ARPP dispose :

Au point 1-3 que « D’une façon générale, toute représentation dégradante ou humiliante de la personne humaine, explicite ou implicite, est exclue, notamment au travers de qualificatifs, d’attitudes, de postures (…) etc., attentatoires à la dignité humaine ».

Au point 2-1 que « La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet ».

Le Jury invite l’annonceur à consulter les nombreuses décisions concernant l’application de la Recommandation « Image de la personne humaine » publiées sur son site, ce qui lui permettra de constater que les publicités dans lesquelles un défaut de respect des principes a été relevé concernent tous lieux du territoire national et sont relatives tant à l’image de la femme, qu’à celle des hommes.

Il relève que la publicité en cause met en scène une femme, habillée de façon provocante, en minijupe et bottes cuissardes, la jupe étant relevée en haut des cuisses.

Cette représentation accompagnée du slogan « Résisterez-vous à autant d’avantages ? », donne à l’ensemble une connotation sexuelle évidente.

La publicité utilise ainsi comme faire valoir commercial une image de la femme réduite à une fonction d’objet sexuel qui contrevient aux dispositions précitées.

5.La décision du Jury

– La plainte est fondée ;

– La publicité en cause contrevient aux points 1.3 et 2.1 de la Recommandation Image de la Personne Humaine ;

– Il est demandé au Directeur général de l’ARPP de prendre toutes mesures de nature à assurer le non renouvellement de cette publicité;

– La décision sera communiquée à l’association plaignante, à l’annonceur et au journal;

– Elle sera publiée sur le site du JDP ;

Délibéré le 26 août 2013, par Mme Michel-Amsellem, Présidente, MM. Depincé, Lacan et Leers.