Avis JDP n°402/16 – LOCATION DE VEHICULES – Plainte fondée

Avis publié le 01 mars 2016
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et, après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 21 décembre 2015, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité imprimée sur les flancs de véhicules de location pour un site internet proposant des formations en auto-école et des locations de véhicules.

Cette publicité comporte l’inscription « J’apprends à conduire avec mon père, mon frère… et même ma mère. »

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité est choquante et clairement sexiste. Il indique avoir contacté la société, qui a fait valoir l’humour du texte publicitaire.

– La société annonceur a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 11 janvier 2016, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

La société indique qu’elle est spécialisée dans la location de véhicules de type auto-école depuis plus de cinq ans. En complément de la formation en auto-école, ses clients peuvent louer des véhicules à l’aide d’un proche titulaire du permis de conduire depuis plus de 5 ans.

Elle expose que cette phrase n’avait pas pour but de heurter la sensibilité de sa clientèle ou de l’audience, mais de préciser qu’il était possible de louer un véhicule à l’aide d’un proche (parents, amis…) et non d’un moniteur.

Elle ajoute que cette phrase a fait l’objet d’une question lors d’un sondage auprès de la clientèle en novembre 2011 pour approbation (627 réponses). A la question « Que pensez-vous de la phrase j’apprends à conduire avec mon père, mon frère… et même ma mère ! », 96% des sondés ont répondu « drôle et accrocheuse », 2,4% l’ont trouvée « sexiste », et 1,6% « inadaptée ».

Par ailleurs, plus de 6% de la clientèle a connu le service de l’annonceur grâce à la publicité sur les véhicules de l’entreprise, et aucune plainte n’était remontée jusqu’à ce jour.

3. L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP dispose  que :

«La publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence ».

« D’une façon générale, toute représentation dégradante ou humiliante de la personne humaine, explicite ou implicite, est exclue, notamment au travers de qualificatifs, d’attitudes, de postures, de gestes, de sons, etc., attentatoires à la dignité humaine ».

« L’expression de stéréotypes, évoquant les caractères censés être représentatifs d’un groupe social, ethnique, etc., doit tout particulièrement respecter les principes développés dans la présente Recommandation ».

Le Jury relève que la phrase « J’apprends à conduire avec mon père, mon frère… et même ma mère ! » exprime l’idée que la mère est la personne la moins compétente de la famille pour aider à la pratique de la conduite automobile, et s’appuie ainsi sur un stéréotype dégradant et rétrograde selon lequel les femmes ne savent pas conduire correctement.

Ni l’humour dont se réclame l’annonceur, ni le sondage qu’il invoque, et dont il n’explique pas le caractère représentatif de l’échantillon choisi, ne sont de nature à atténuer la portée du stéréotype qu’il contribue à véhiculer par son slogan.

Le Jury est donc d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions de la Recommandation précitée.

Avis adopté le vendredi 5 février 2016 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, Mme Sophie-Justine Lieber, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Moggio et MM. Benhaïm, Lacan et Leers.