Avis JDP n°359/15 – ORGANISMES DE CREDIT – Plainte fondée

Avis publié le 21 janvier 2015
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,

– et, après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 30 novembre 2014, d’une plainte d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée en presse, en faveur d’une offre de financement.

Cette publicité présente, dans sa partie haute, l’image de plusieurs hommes intégralement nus, dont l’un est un rugbyman célèbre, tenant un ballon de rugby devant leur sexe.

Le reste de la publicité détaille les conditions de l’offre de crédit et comporte un coupon réponse à remplir par le consommateur.

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité, érotisée, qui utilise l’imagerie du calendrier des « Dieux du stade » pose problème en raison de sa parution dans un magazine tout public.

Il ajoute que l’utilisation des corps nus n’est pas du tout justifiée, car sans lien logique avec le produit et porte préjudice à la dignité de la personne humaine.

– La société annonceur a été informée par courrier recommandé avec avis de réception du 15 décembre 2014 de la plainte, dont copie lui a été transmise, et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

Dans les observations qu’elle a adressées au Jury, la société fait valoir que ce visuel s’inscrit dans le cadre d’une campagne publicitaire jouant sur le registre de l’humour, comprenant neuf films et une quinzaine de visuels déclinés des films, développés par l’agence depuis 2013 pour promouvoir les services de la marque.

Elle ajoute que les procédures de validation du film télévisé auprès de l’ARPP ont été respectées et la campagne a, à ce titre, reçu un avis favorable pour la diffusion.

Cette campagne reposant sur un partenariat avec le joueur de rugby Frédéric Michalak, l’ensemble des communications publicitaires met en scène un homme, représentant la marque, qui se retrouve impliqué par l’équipe de Rugby de ce joueur dans des situations loufoques, décalées et humoristiques liées à l’univers du rugby et des différents moments liés à ce sport. Ce visuel s’inscrit dans ce cadre en faisant un clin d’oeil aux photographies des joueurs de Rugby dénudés composant un calendrier et qui sont très connues du public. Il fait écho à un film publicitaire représentant une séance de prise de vues de l’équipe de rugby souhaitant faire poser « nu » le héros de la marque.

La société précise que le visuel mis en cause ne présente aucune attitude équivoque et qu’elle n’a pas eu la volonté de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à la dignité et à la décence. La présentation de la scène n’a aucun caractère avilissant.

Elle ajoute que le visuel objet de la plainte a été diffusé simultanément au film et a fait l’objet de plusieurs vagues de diffusion télévisées sans susciter de réactions négatives du public. Au contraire, la campagne a été très bien accueillie sur les réseaux sociaux avec, lors du premier passage de la vidéo de la campagne en mars, un score important de visibilité sur Facebook de 6.958 likes et partages et des réactions positives sur Twitter.

La société annonceur et l’agence, particulièrement respectueuses d’une communication responsable, n’ont pas considéré, dans le contexte de la campagne publicitaire, contrevenir aux dispositions des Recommandations de I’ARPP relatives à l’image de la personne humaine ni plus généralement au code consolidé de la Chambre de commerce internationale.

3. L’analyse du Jury

 Le Jury rappelle que la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) dispose en son point 2/1 que : « La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet. »

 Il relève que la publicité mise en cause représente des modèles masculins intégralement nus, cette représentation du corps de l’homme n’entretenant aucun lien avec l’objet de la publicité, qui est de promouvoir des offres de crédit.

A l’inverse des films qui mettent en scène un scénario et permettent au spectateur de comprendre les raisons de l’utilisation humoristique de la nudité des modèles, la photo utilisée seule et extraite de son contexte narratif pour la publicité diffusée en presse écrite par la société est dépourvue de sens. L’homme y apparaît ainsi réduit à la seule fonction d’objet.

Dans ces conditions, le Jury est d’avis que cette publicité n’est pas conforme aux dispositions précitées.

Le présent avis sera publié sur le site internet du Jury de Déontologie Publicitaire.

Avis adopté le vendredi 9 janvier 2015 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, M. Lallet, Vice-Président, Mmes Drecq et Moggio et MM. Benhaïm, Carlo, Depincé, Lacan et Leers.