Avis JDP n°405/16 – AUTOMOBILE – Plainte fondée

Avis publié le 23 mars 2016
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et, après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 28 octobre 2015, d’une plainte d’un consommateur anglais, transmise dans le cadre de la procédure de traitement des plaintes transfrontalières mise en place par les organismes européens d’autodiscipline publicitaire, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une vidéo publicitaire en faveur d’un constructeur automobile.

Cette vidéo, diffusée sur la page Facebook de la marque, présente un personnage au volant du modèle de véhicule, accompagné d’un petit singe comme passager, qui tente d’échapper à des poursuivants.

Le véhicule évolue à grande vitesse dans un décor urbain, effectue des bonds, têtes à queues, démarrages rapides, etc.

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité est irresponsable car elle met en évidence une conduite dangereuse.

– L’agence de communication qui a réalisé cette campagne pour l’annonceur qu’elle représente, a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 29 janvier 2016, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée. Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

L’agence fait valoir que, dans le cadre du lancement de la nouvelle voiture, un dispositif de communication international a été mis en place depuis la présentation officielle de la voiture au salon de Francfort. Il intègre les images auxquelles il est fait référence dans la plainte, qui ont été réalisées dans l’esprit des blockbusters américains. Elles reprennent ainsi les codes classiques d’une course poursuite dans un film d’action, dans un registre parodique et non réaliste. Ce registre parodique ne peut échapper au spectateur qui n’y verra pas d’incitation à un comportement inapproprié au volant d’un véhicule.

A ce titre, le trait a été volontairement exagéré en filmant des cascades « impossibles » qui n’ont pu être réalisées qu’avec le concours d’effets spéciaux et l’aide de professionnels, avec la volonté de reproduire les codes d’un film d’action et non de faire une démonstration factuelle des capacités du véhicule. Une mention en préambule du film indique qu’il a « été réalisé sous la supervision d’une équipe professionnelle et dans un circuit fermé ».

Ce film est vraiment conçu comme un court métrage à vocation de divertissement. La présence dans le film du singe protagoniste de comédies américaines, souligne l’aspect fictif de cette mise en scène et le clin d’œil à Hollywood. L’agence ajoute que son client diffuse d’ailleurs un making-of de ce film sur ses réseaux sociaux qui montre que les scènes d’actions ne sont finalisées qu’avec le recours de la post-production.

Elle précise enfin que ce film n’a fait l’objet d’aucune plainte de consommateurs lors de sa diffusion.

3. L’analyse du Jury

 Le Jury rappelle que la Recommandation « Automobile » de l’ARPP dispose  que :

« En plus des dispositions législatives et réglementaires applicables, la publicité pour un véhicule de tourisme doit, sous quelque forme que ce soit, respecter les règles déontologiques suivantes :

 La publicité ne doit pas argumenter sur la vitesse, non plus qu’exploiter l’attrait que celle-ci pourrait représenter, tant dans l’expression visuelle, sonore, qu’écrite dans les messages » ;

 Elle ne doit pas donner à penser, dans les messages, que les qualités des véhicules en matière de sécurité active et passive permettent de transgresser les règles élémentaires de prudence qui s’imposent à tout conducteur ;

 Elle ne doit pas susciter chez les conducteurs un comportement agressif, violent ou portant atteinte aux autres usagers de la route ».

 Le Jury relève que la publicité en cause met en scène un homme au volant d’une voiture, accompagné d’un petit singe, qui tente de semer des poursuivants en conduisant à très vive allure, notamment sur une autoroute, sur le mode d’une course poursuite dans un film d’action. Cette première séquence est suivie d’une deuxième au cours de laquelle le petit singe sort de la voiture pour aller va provoquer des bandits qui vont à leur tour s’élancer à la poursuite de la voiture, pour la plus grande joie de ses occupants. Cette publicité, qui joue sur l’attrait de la vitesse et de la prise de risque, contrevient frontalement à la recommandation précitée. Il est à cet égard sans incidence que cette publicité parodie les codes des courses poursuites dans les films d’action ou qu’il soit précédé d’une mention selon laquelle il a « été réalisé sous la supervision d’une équipe professionnelle et dans un circuit fermé ».

Le Jury est donc d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions de la Recommandation précitée.

Avis adopté le mardi 1er mars 2016 par Mme Sophie-Justine Lieber, Vice-Présidente, Mme Drecq et MM. Carlo, Lacan et Leers.