Avis JDP n°374/15 – PRODUITS AMAIGRISSANTS – Plainte fondée

Avis publié le 22 juillet 2015
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et, après en avoir débattu,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 20 avril 2015, d’une plainte du « Réseau anti-arnaques », afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée en presse, dans un magazine, en faveur de la société annonceur, pour sa cure d’amaigrissement.

La publicité se présente sur une double page avec sur la gauche, un texte en quatre colonnes relatant le témoignage d’une utilisatrice du produit et titré « Eva, une mère de famille de Genève découvre accidentellement le secret pour maigrir sans régime contraignant… Un simple stick de café lui a permis de perdre 24 kilos en moins de 2 mois… », accompagné de deux photos avant/après illustrant une perte de poids de 24 kilos.

La page de droite comporte un encadré de couleur jaune assorti de la photo d’un homme en blouse blanche identifié comme étant « D. Gilbert, expert en nutrition », le texte de cette partie est surmonté du préambule suivant : « Ce grand spécialiste nous explique comment la cure X combat les 5 raisons principales de vos kilos en trop……… ».

Le bas de la page est constitué d’un bon de commande avec les coordonnées de l’entreprise. Sous ce bon de commande figurent un certain nombre de précisions en très petits caractères, dont celle-ci « Cet interview comme le personnage de D. Gilbert sont à considérer comme une fiction dans un cadre promotionnel ».

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que les témoignages utilisés font croire indûment au lecteur que le produit est recommandé par un professionnel de santé et une utilisatrice réelle, alors que ces personnes sont fictives.

– La société annonceur a été informée par courrier recommandé avec avis de réception du 5 juin 2015 de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Son responsable fait valoir que le produit en cause est accompagné d’un livret de conseils et a été testé cliniquement avec des résultats visibles sur le site internet de la société (un QR code permet même d’y accéder directement).

Il ajoute que les témoignages mis en ligne sur son site ont été contrôlés par un huissier et ont fait l’objet d’enregistrements vidéo qui renforcent leur authenticité. Il précise aussi que le produit a fait l’objet d’un dépôt auprès de la DGCCRF et qu’il est promu sur une émission télévisée, ce qui démontre qu’il est considéré comme une référence professionnelle.

Le représentant de la société annonceur indique encore que la présentation du témoin et de D. Gilbert comme étant des personnages fictifs est justifiée par le refus des témoins, qui ne souhaitent pas apparaître publiquement et par l’interdiction déontologique pour le médecin qui a mis au point le concept et le protocole de test d’apparaître personnellement, ce qui a conduit à le remplacer par le pseudonyme D. Gilbert.

– La société éditrice du titre de presse magazine ayant diffusé la publicité, indique que la mention relative aux témoignages est parfaitement lisible, signalée par des astérisques accolés au nom des personnes présentées comme témoin dès la première mention de leur nom. Cette mention apporte, de plus, les précisions complémentaires nécessaires à la lecture et la compréhension du message.

Son responsable ajoute que la mention de l’annonceur tend à présenter les témoignages comme un condensé et une version romancée des témoignages qui lui sont habituellement adressés par les utilisateurs du produit concerné.

3. L’analyse du Jury 

Le Jury rappelle qu’il n’a ni fonction, ni pouvoir juridictionnels. Il a reçu pour mission de la part de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) de donner son avis sur le respect de la déontologie publicitaire au regard des principes énoncés par le code de la Chambre de commerce internationale sur les pratiques de publicité et de communication marketing (le code CCI consolidé) et des Recommandations édictées en son sein par les représentants des professionnels associés au sein de l’ARPP.

Il relève qu’il résulte des dispositions de la Recommandation « Attestations » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) que :

« La publicité qui utilise sous forme d’argument publicitaire des attestations de personnes connues ou non, doit, sous quelque forme que ce soit, respecter les règles déontologiques suivantes : “la communication de marketing ne doit reproduire ou citer aucune attestation, recommandation ou documentation de soutien qui ne soit véridique, vérifiable, et pertinente. L’utilisation d’attestations ou de recommandations périmées, ou rendues trompeuses par le passage du temps est prohibée”  Art. 13 du Code de la CCI.

Lorsque la publicité utilise, sous quelque forme que ce soit, des attestations émanant de personnes ou de personnalités dont les compétences indiscutables leur permettent de donner un avis autorisé sur certains sujets, ces attestations répondent aux conditions suivantes : elles doivent être fondées sur des expériences effectuées par la personne elle-même (ou d’autres personnes sous son contrôle direct) sur le produit fini, dans des conditions correspondant à son utilisation normale ;

(…)

Les conditions dans lesquelles ces expériences auront été effectuées et les résultats obtenus devront clairement être explicités dans un document élaboré avant la première diffusion de la publicité. »

Le Jury observe que la plainte porte seulement sur la publicité de la société annonceur pour son produit et la cure d’amaigrissement en cause parue dans la presse et non sur le site de la société. Par ailleurs, elle ne met pas en cause l’efficacité du produit, mais le fait que les mentions indiquant le caractère fictif du témoignage et de l’expertise médicale soient illisibles. Dans ces conditions, il n’a pas à examiner et se prononcer sur les mentions figurant sur le site de l’annonceur, ni sur la question de savoir si les allégations relatives aux résultats du produit respectent les principes de déontologie publicitaire.

En revanche, la société annonceur utilise dans sa publicité un témoignage d’une personne qui relate son expérience du produit et les effets qu’elle a constatés à l’usage, ainsi qu’une attestation d’une personne désignée comme « D. Gilbert, expert en nutrition ». Le message précise dans une note de bas de page, placée sous le bon de commande, que le témoignage et l’attestation sont fictifs et présentés à des fins promotionnelles.

Le Jury relève sur ce point que la société annonceur n’a présenté aucun élément attestant du caractère véridique de ce témoignage et qu’elle ne permet ni au consommateur, ni au Jury de vérifier ce point.

Par ailleurs, l’encart explicatif illustré par la photo d’un homme en blouse blanche présenté comme « expert en nutrition », est titré : « Ce grand spécialiste nous explique comment la cure X combat les 5 raisons principales de vos kilos en trop ». Ce procédé donne une caution scientifique au produit, alors qu’aucun élément, ni dans la publicité, ni dans ceux apportés par l’annonceur ne permet de constater que l’attestation serait fondée sur des expériences effectuées par la personne elle-même (ou d’autres personnes sous son contrôle direct) sur le produit fini, dans des conditions correspondant à son utilisation normale.

La mention précisant que ces deux témoignages sont fictifs et présentés à des fins promotionnelles n’apparaît pas suffisante pour éclairer le consommateur sur la portée de ces attestations. D’une part, sa place dans le document et les caractères extrêmement réduits ne permettent pas un accès aisé au lecteur, en dépit de l’astérisque accolé aux premières mentions relatives aux deux attestants.  D’autre part, et en tout état de cause, cette mention est elle-même source de confusion quant à la véracité des attestations qui forment l’essentiel du propos de la publicité litigieuse.

En conséquence, le Jury est d’avis que la publicité de la société annonceur pour le produit en cause paru dans un journal hebdomadaire, n’est pas conforme aux règles précitées.

Le présent avis sera publié sur le site internet du Jury de Déontologie Publicitaire.

Avis adopté le vendredi 3 juillet 2015 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, M. Alexandre Lallet, Vice-Président, Mmes Drecq et Moggio et MM.  Carlo, Depincé, Lacan et Leers.