Avis JDP n°411/16 – SERVICES DE DEPANNAGE – Plainte fondée

Avis publié le 10 mai 2016
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

  • Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,
  • les personnes intéressées ayant été invitées à faire valoir leurs observations,
  • et après en avoir débattu dans les conditions prévues par l’article 12 du règlement intérieur,

rend l’avis suivant :

1. La plainte

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 27 février 2016, d’une plainte émanant d’un particulier, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité diffusée sur Internet par une société proposant des dépannages à domicile.

Cette publicité présente, en visuel, l’image d’une femme allongée, de profil, dans un bain rempli de mousse, qui laisse apparaître un côté de son corps nu (épaule, bras, dos, fesse et cuisse).

Le texte accompagnant cette image est « Marre de la moisissure ? … remplace vos joints pour 35€ ! – Vous ne voyez que ça et vous n’en pouvez plus ? www……….fr ».

2. Les arguments échangés

– Le plaignant considère que cette publicité est sexiste et dégradante à l’égard des femmes.

– La société annonceur a été informée, par courrier recommandé avec avis de réception du 7 mars 2016, de la plainte dont copie lui a été transmise et des dispositions dont la violation est invoquée.

Elle a été également informée que cette affaire ferait l’objet d’un examen dans le cadre de la procédure simplifiée prévue à l’article 12 du règlement intérieur du Jury.

La société trouve tout d’abord dommageable que le signalement adressé par l’internaute (anonyme) ne comporte aucune justification, ni argument explicitant le caractère prétendument sexiste et dégradant de la publicité.

Elle fait observer que cette publicité, diffusée dans le cadre du lancement d’un nouveau service de remplacement de joints de baignoire ou de douche pour un prix modique, ne représente qu’une femme dans sa baignoire.

Elle ajoute que la posture de cette femme n’a rien de dégradant, que son attitude n’est en rien ambiguë, et que l’image ne révèle aucun attribut féminin, aucune partie intime. La publicité représente simplement une femme dans sa baignoire montrant du doigt des traces de moisissures sur les joints et a pour seul objectif d’attirer l’attention de l’internaute sur ces traces de moisissures.

D’ailleurs, le texte accompagnant l’image est particulièrement éloquent, invitant l’internaute à ne pas s’arrêter au premier regard, mais à rechercher les motifs d’un tel slogan (« Vous ne voyez que ça et vous n’en pouvez plus ? »).

Dès lors, selon elle, aucun élément ne permet de considérer que cette publicité porte une quelconque atteinte à la condition des femmes. Il s’agit tout simplement d’une publicité décalée.

La société annonceur indique qu’elle a également fait publier une publicité similaire avec un homme dans son bain, avec des traces de moisissures sur les joints.

Elle souligne que, pionnière de la « French Tech » et fondée par deux associés – un homme et une femme – elle s’est toujours investie dans les discriminations en prenant systématiquement le contrepied des clichés véhiculés par la société. Son représentant a transmis au Jury diverses campagnes publicitaires menées par le passé qui visent tantôt à encourager les femmes à investir des métiers réputés réservés aux hommes, tantôt à contredire le cliché selon lequel seuls les hommes savent bricoler.

3. L’analyse du Jury

 Le Jury rappelle que la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP dispose en son point 2 que :

« 2.1 La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet ».

 Le Jury relève que la publicité en cause montre une jeune femme nue dans un bain moussant, dans une position lascive et placée de façon à faire apparaître l’ensemble de son corps, pour promouvoir un site de dépannage qui propose notamment le remplacement de joints. Sous l’image figure la phrase « Vous ne voyez que ça et vous n’en pouvez plus ? ».

Cette présentation utilise le corps de la femme comme faire valoir d’un service sans rapport avec le corps. En outre, en s’appuyant sur l’incitation sexuelle pour faire la publicité d’un service de dépannage à domicile, elle réduit la femme à la fonction d’objet sexuel.

L’intention humoristique de l’annonceur et le fait que, si le corps est nu, les parties intimes ne sont pas montrées, sont sans portée sur l’appréciation du respect des principes déontologiques que la profession s’est engagée à respecter.

En conséquence de ce qui précède, le Jury est d’avis que la publicité en cause méconnaît le point 2.1 de la Recommandation précitée.

Le Jury est donc d’avis que la publicité en cause méconnaît les dispositions de la Recommandation précitée.

Avis adopté le vendredi 1er avril 2016 par Mme Michel-Amsellem, Présidente, Mme Sophie-Justine Lieber, Vice-Présidente, Mmes Drecq et Moggio et MM. Benhaïm, Carlo, Lacan et Leers.