Avis JDP n°344/14 – SERVICES PETITE ENFANCE – Plainte fondée

Avis publié le 29 octobre 2014
Plainte fondée

Le Jury de Déontologie Publicitaire,

– Après examen des éléments constituant le dossier de plainte,

– et, après en avoir débattu, dans les conditions prévues à l’article 17 du règlement intérieur du Jury de Déontologie Publicitaire,

rend l’avis suivant :

1.Les faits

Le Jury de Déontologie Publicitaire a été saisi, le 13 octobre 2014, d’une plainte de la représentante de l’association nationale des centres de référence de la mort inattendue du nourrisson (ANCReMIN), ainsi que de l’association Naître et vivre, afin qu’il se prononce sur la conformité aux règles déontologiques en vigueur d’une publicité en faveur d’un site proposant une offre de places en crèche disponibles.

La publicité en cause, diffusée en affichage et sur le site internet de l’entreprise, montre un bébé endormi, allongé sur le ventre, tenant un jouet en peluche dans son bras gauche.

Le texte accompagnant cette image est « Une nouvelle crèche ouvre à 5 minutes d’ici ! ».

2.La procédure

L’article 17 du règlement intérieur du Jury prévoit que : « Dans le cas d’un manquement manifestement grave et sérieux, qu’il convient de faire cesser rapidement , le Président de l’ARPP ou, par délégation, son Directeur Général, peut, conformément à la procédure d’urgence prévue par le règlement intérieur de l’ARPP, prendre sur le champ les mesures qui s’imposent, notamment en adressant une demande de cessation de diffusion aux professionnels concernés (annonceurs, agence, médias). Il en informe le Président du Jury. En cas de plainte, le cas est présenté pour délibération au Jury lors de la séance qui suit cette intervention. Sa décision fait l’objet d’une publication aux conditions prévues à l’article 21. ».

Le 14 octobre 2014, le Directeur général de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a demandé à l’annonceur la cessation de la diffusion de cette publicité, puis en a informé la Présidente et le Vice-Président du Jury, dans les conditions prévues par l’article 17 de son règlement intérieur.

Le même jour, les personnes concernées ont été informées par courriers électroniques et par lettre recommandée avec accusé de réception de l’examen de la campagne par le Jury, lors de sa séance du 17 octobre 2014.

3.Les arguments échangés

 La plaignante considère que cette publicité comporte une image extrêmement dangereuse d’un bébé couché sur le ventre sur un support mou, ce qui apparaît en complète contradiction avec les conseils de prévention de la Mort inattendue du Nourrisson diffusés depuis 20 ans en France, et contraire à l’avis de 2007 de l’ARPP.

Elle rappelle qu’environ 500 décès de nourrissons se produisent chaque année en France, dont 150 sont liés à de mauvaises conditions de couchage.

Selon elle, cette publicité est d’autant plus scandaleuse qu’il s’agit d’une annonce pour une entreprise commerciale du domaine de la petite enfance, en l’occurrence une « agence de placement en crèche pour les familles et les entreprises », laquelle estime répondre aux normes de sécurité et d’hygiène et annonce bénéficier d’un agrément des services de la protection maternelle et infantile.

L’annonceur n’a pas adressé d’observations.

4.L’analyse du Jury

Le Jury rappelle que la Recommandation « Sécurité » de l’ARPP, qui reprend, dans son préambule, les dispositions du Code consolidé de la Chambre de Commerce Internationale (dit code ICC), dispose que :

« La publicité, sous quelque forme que ce soit, ne doit pas porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens et doit donc respecter les règles déontologiques suivantes : / Sauf justification d’ordre éducatif ou social, la publicité ne doit comporter aucune présentation visuelle ni aucune description des pratiques dangereuses ou de situation où la sécurité et la santé ne sont pas respectées ».

En outre, l’article 13 du Code ICC énonce que : « Une prudence particulière s’impose aux publicités utilisant des enfants ou des adolescents ou s’adressant à eux. ».

Ainsi que le Jury l’avait constaté dans son avis n° 286/13 du 28 novembre 2013, les données actuellement disponibles révèlent que le couchage ventral des bébés est une cause importante de « mort inattendue du nourrisson », dénommée aussi « mort subite du nouveau-né ». Ce risque est de surcroît accentué en l’espèce par le caractère manifestement moelleux de la literie sur laquelle repose l’enfant, alors que les recommandations sanitaires pour éviter les risques de décès insistent sur la nécessité de coucher les enfants sur un matelas ferme.

Le Jury considère ainsi que la publicité mise en cause est susceptible d’entraîner, par mimétisme, des risques pour la santé des nourrissons, d’autant qu’elle émane d’une entreprise qui, par nature, est associée par une majorité du public à une idée de préservation de la santé des plus petits.

Dans ces conditions, et dans le cadre de la procédure d’urgence prévue à l’article 17 de son règlement intérieur, le Jury de déontologie publicitaire est d’avis que la publicité en cause ne respecte pas les dispositions précitées de la Recommandation « Sécurité » de l’ARPP.

Le présent avis sera publié sur le site internet du Jury de Déontologie Publicitaire.

Avis adopté le vendredi 17 octobre 2014 par M. Lallet, Vice-président, Mme Drecq et MM. Benhaïm, Carlo, Depincé, Lacan et Leers.